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Les produits à base de soja se multiplient et sont tendance. Alternative végétale prisée car riche en protéines, cette plante est même utilisée en substitut d’autres aliments, comme la viande. Ainsi, sans même que nous le sachions, nous mangeons du soja très régulièrement. C’est aussi en partie avec des protéines de soja que sont nourris les animaux dans l’Union Européenne. Mais en France, en Allemagne, au Canada ou aux États-Unis, les autorités sanitaires s’inquiètent et recommandent de limiter la consommation de soja.

On s’en passe en cas d’hypothyroïdie

Tout comme la patate douce et les crucifères crus (type brocolis), les produits à base de soja peuvent empêcher la bonne absorption de l’iode dans notre organisme, donc perturber la production des hormones thyroïdiennes. Consommer du soja n’entraîne pas des problèmes de thyroïde si notre glande fonctionne normalement, en revanche, en cas d’hypothyroïdie, il est souvent proscrit, en particulier si on prend un traitement. La notice du Lévothyrox prévient par exemple que « le soja peut diminuer l’efficacité de ce médicament ».

Des composés qui perturbent la fertilité

L’activité hormonale des isoflavones présentes dans le soja est avérée depuis les années 1940 en Australie. Ainsi des brebis que l’on faisait paître sur des champs de trèfle rouge ou souterrain (riches en isoflavones) développaient un syndrome d’infertilité. Le phénomène était spectaculaire. En l’espace de trois à quatre saisons ssur ces pâtures, la fertilité des animaux s’effondrait. Il fut alors mis fin à un nombre important d’élevages.

Il fallut attendre la fin des années 1950 pour que des études vétérinaires expliquent enfin le syndrome des brebis : les isoflavones perturbent plusieurs mécanismes endocriniens, et notamment la sécrétion de la FSH et de la LH, des hormones de l’hypophyse contrôlant la reproduction.

Dans les années 1990, l’impact chez l’être humain finit par être envisagé. À l’époque, on considèrait les effets du soja sous un angle positif, en imaginant qu’il pourrait limiter la sécrétion d’estradiol et peut-être réduire le risque de cancer du sein. On a alors constaté, sur un petit nombre de jeunes femmes britanniques, que la consommation quotidienne de 60 g de soja (soit 45 mg d’isoflavones pendant un mois) peut allonger le cycle menstruel de 28 à 30 jours en réduisant la production de FSH et LH.

Quelques années plus tard, une étude d’intervention menée avec 40 jeunes étudiantes japonaises aboutit à des conclusions similaires : une consommation quotidienne de 20 à 40 mg d’isoflavones s’est traduite par des cycles menstruels plus irréguliers et plus longs que ceux des femmes occidentales (30 jours versus 28). En ajoutant à leur alimentation du jus de soja contenant 50 mg d’isoflavones, ledit cycle pouvait atteindre 32 jours.
Des travaux à mettre en perspective avec ceux d’une équipe américaine qui avaint noté, dans les années 1970, que 60 % des plantes traditionnellement utilisées en occident pour leurs vertus contraceptives sont riches en isoflavones…

Y a-t-il un lien entre soja et cancer du sein ?

L’exposition tout au long de la vie aux œstrogènes étant associée à un risque accru de cancer du sein, on est en droit de se demander si les isoflavones contenues dans le soja sont nocives et favorisent la survenue de ce cancer.

Effet protecteur : Chez les femmes asiatiques, les données disponibles montrent un effet protecteur des phyto-œstrogènes. La consommation quotidienne d’isoflavones dans ces pays oscille autour de 50mg/j, mais peut aller jusqu’à 100 mg/j. Lorsque ces femmes migrent vers les pays occidentaux et abandonnent leur alimentation initialement riche en soja, elles perdent cet effet protecteur.
Cet effet est aujourd’hui reconnu par l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), mais n’est pas transposable aux femmes occidentales, dont la consommation en isoflavones est trop faible pour en tirer des conclusions (1 à 2 mg/j). Il serait intéressant d’étudier les effets d’une alimentation riche en isoflavones sur une population occidentale, mais les données à ce sujet manquent.

Enfin, des études épidémiologiques récentes montrent que la consommation de soja contribue à réduire le risque de survenue de cancer du sein, lorsqu’elle est commencée tôt (avant l’adolescence) et maintenue tout au long de la vie.

De nombreuses études vont donc dans le sens d’un effet protecteur du soja vis–à-vis du risque du cancer du sein.

Personnes à risque : En revanche, pour les personnes atteintes d’un cancer du sein ou ayant des antécédents de ce cancer, on recommande de s’abstenir de prendre des suppléments contenant des isoflavones et de limiter l’apport alimentaire en isoflavones à environ 50 mg/jour (= 1 à 2 produits au soja/jour)

Quels apports conseillés en pratique ?

Les produits de soja ne sont pas sans danger sur la santé. Leur consommation reste déconseillée chez les enfants de moins de 3 ans et les femmes enceintes, et ne devrait pas dépasser chez l’adulte la dose de 1mg/kg de poids corporel en isoflavone aglycane, si on se réfère à l’avis scientifique de l’Afssa (cf. document pdf : saisine 2004-SA-0363).

En pratique, il est conseillé de se limiter à une consommation d’un produit de soja par jour chez l’adulte. Il faut en écarter toute consommation régulière chez le nourrisson (en particulier sous forme de jus). Pour ces mêmes raisons, les suppléments alimentaires contenant du soja sont déconseillés.